Jean-François Boisvert
« La seule décision qui a changé ma vie, c'est de ne pas travailler à temps plein. »
Jean-François Boisvert est président de la Coalition Climat Montréal et membre du comité de coordination du Front commun pour la transition énergétique (FCTÉ). Il a cofondé la Coalition il y a 8 ans. Son implication dans la transition socio-écologique est entièrement bénévole.
Retraité depuis maintenant 2 ans, ce Lavallois de 63 ans a fait carrière chez Vidéotron en technologie de l’information où il s’est spécialisé en modélisation de données.
« La seule décision qui a changé ma vie, c’est de ne pas travailler à temps plein. ».
Cette chance de pouvoir travailler à temps partiel lui a permis d’avoir du temps. Du temps pour ne pas être à la course. Du temps de qualité avec ses deux enfants. Du temps pour s’informer, se sensibiliser, puis surtout pour s’impliquer dans la transition socio-écologique. « Je trouve que j’ai eu une belle vie pour ça »
Suite à l’Accord de Kyoto dans les années 1990, des premières manifestations s’organisent à Montréal. Jean-François y prenait part et commençait à lire des rapports, à analyser des graphiques et des chiffres qui témoignent de la crise climatique : « à partir du moment que t’es convaincu de ça, t’as pas le choix d’agir».
« J’ai toujours vécu simplement »
Né à Magog, Jean-François est arrivé à Montréal vers l’âge de 21 ans pour faire son baccalauréat en informatique à l’UQÀM. Au début des années 2000, il a commencé à s’impliquer dans un mouvement de simplicité volontaire mettant de l’avant un mode de vie axé sur une moins grande consommation : « ça peut être de moins acheter de toutes sortes de choses, de moins voyager, de ne pas avoir de voiture, d’avoir de petits logements, de partager davantage, d’utiliser des services d’échange […] »
C’est un mode de vie qui se mariait bien avec sa vision du monde : « je ne suis pas quelqu’un qui consommait beaucoup, ce qui me permettait entre autres de moins travailler, parce que j’avais peu de besoins financiers. » Ses deux enfants ont grandi dans une simplicité qu’il qualifie de « soft » où l’objectif était de consommer moins que la moyenne. Maintenant grand-papa, Jean-François croit avoir inculqué des valeurs communes à sa famille.
Toutefois, il souligne que la simplicité volontaire ne concerne que l’individu. Son implication dans la transition socio-écologique ne pouvait donc pas s’arrêter là.
« Soit on choisit la décroissance, soit on la subit »
Pour Jean-François, pour être en mesure de réaliser des changements significatifs dans la société dans une perspective de transition, il faut aller au-delà des gestes individuels pour que la société elle aussi se transforme et produise moins. C’est là que le mouvement de décroissance prend son essor. Il s’est beaucoup inspiré du professeur et chercheur sur la décroissance Yves-Marie Abraham pour fonder sa pensée.
« Le mot décroissance, il fait peur un peu », mentionne-t-il. Toutefois, la seule façon efficace et réelle de s’en sortir c’est de décroître, et pour décroître, c’est par la transition socio-écologique qu’on y arrive. En effet, la transition c’est la démarche qu’il faut prendre pour sortir du modèle actuel qui nous mène vers la catastrophe.
Des actions ciblées
« Moi, j’ai vécu toute ma vie adulte à Montréal, au centre-ville, proche d’un métro. J’allais travailler en vélo. […] C’était facile d’être écologique. Mais quand les gens vivent dans les couronnes, c’est plus difficile. Il n’y a pas de transport en commun. Tout est loin. Il n’y a pas de magasin proche. On a bâti un monde où, pour certains, c’est difficile de faire la transition. Le défi est là aussi. »
Selon lui, il faut que les citoyens et citoyennes puissent en discuter. La participation citoyenne est l’un des axes principaux de la Coalition Climat Montréal et du FCTÉ. Un des premiers projets de la Coalition était d’instaurer une consultation publique pour la réduction de la dépendance aux énergies fossiles de la ville de Montréal.
Avec le FCTÉ, Jean-François développe des propositions techniques et sociales pour diminuer notre consommation et production en énergie.
Faire la transition, mais pour qui?
« Si, mettons, tu as un enfant, puis il est malade, tu vas faire tout ce que tu peux pour le sauver. Même si le médecin dit, ah, bien, il a peut-être juste une chance sur cinq, tu ne diras pas, « bien, tant pis! ». Tu vas trouver une date, tu vas aller au rendez-vous, tu vas tout faire, tu sais. Même si la probabilité que ton enfant guérisse est très faible ».
Pour Jean-François, c’est la même chose pour l’avenir de la planète. Même s’il croit que la probabilité d’éviter la catastrophe est faible, il faut tout faire pour éviter le pire. « Il faut la faire pour tout le monde (la transition), mais il faut la faire surtout pour les jeunes […] pour les plus démunis aussi, c’est souvent eux qui souffrent le plus »
Il faut que la transition soit juste en ce sens.