Répression du droit de manifester et brutalité policière au Québec.

Dans une société démocratique, le droit de manifester est un pilier essentiel de la participation citoyenne. Il permet aux individus et aux groupes de s’exprimer, de contester et de faire entendre leurs voix sur des enjeux sociaux, politiques et économiques. Pourtant, au Québec comme ailleurs, ce droit fondamental est de plus en plus menacé par des pratiques policières répressives, souvent marquées par le profilage racial, l’usage démesuré des armes et des attaques ciblées contre les jeunes manifestant·es.

Québec, 10 juin 2024 – Le Regroupement des groupes de femmes de la région de la Capitale-Nationale (RGF-CN), la Coalition pour le droit de manifester à Québec ainsi que la Ligue des droits et libertés – section de Québec (LDL-Qc) ont uni leurs voix pour dénoncer la répression du droit de manifester et la brutalité policière exercée par le Service de police de la Ville de Québec (SPVQ) lors des actions pour le droit à l’avortement du 1er juin 2024.

Sophie Marois, de la Ligue des droits et libertés – section de Québec, a exprimé une profonde inquiétude face à la restriction de la liberté d’association et de réunion pacifique des citoyens rassemblés à Québec pour souligner l’importance du droit à l’avortement. Elle a dénoncé la brutalité et la disproportionnalité des gestes posés par le SPVQ lors de l’arrestation d’une des organisatrices, appelant à une enquête approfondie sur les événements du 1er juin. Marois a insisté sur la nécessité pour la Ville de Québec et le SPVQ de s’engager à contrer la tendance croissante à museler et judiciariser les mouvements sociaux.

En réponse à cette répression, la Coalition pour le droit de manifester à Québec a organisé un rassemblement le 18 juin 2024 devant l’Hôtel de Ville de Québec. Cette manifestation visait à dénoncer le recul du droit de manifester, accentué par l’adoption, il y a près d’un an, du Règlement sur la sécurité lors de la tenue de rassemblements sur la voie publique (R.V.Q. 2817) par l’administration Marchand.

Parallèlement, à Montréal, des manifestations pro-palestiniennes ont également été marquées par des interventions policières violentes. À cet égard, Véronique Dubuc, porte-parole du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), a rapporté que des manœuvres de dispersion utilisant du gaz irritant ont été effectuées, entraînant l’appréhension temporaire d’un jeune manifestant lors d’une manifestation le 11 juillet 2024. « La manifestation, qui avait débuté pacifiquement au square Philips vers 20h30, a dégénéré vers 21h30 suite à une altercation entre manifestants et policiers en habits antiémeute. Le SPVM a alors utilisé des gaz irritants et du poivre de Cayenne pour disperser les manifestant·es, qui protestaient contre les démantèlements de campements, y compris celui du campement pro-palestinien qui avait occupé le campus de l’Université McGill pendant deux mois ».

Ces événements soulignent une tendance inquiétante de répression des mouvements sociaux au Québec. Ces actions des forces policières à Québec et Montréal illustrent une réponse disproportionnée face à des manifestations pacifiques, mettant en péril le droit fondamental de manifester. Les organisations impliquées appellent à une mobilisation citoyenne et à des actions concrètes pour défendre les libertés civiles et les droits démocratiques face à cette répression grandissante.

Le Droit de manifester : Une pierre angulaire de la démocratie

La liberté de réunion pacifique et d’expression est inscrite dans la Charte canadienne des droits et libertés. Elle garantit que chaque citoyen·ne a le droit de s’assembler pacifiquement et de manifester pour exprimer ses opinions. Ce droit est crucial pour le bon fonctionnement d’une démocratie, permettant un débat public ouvert et la possibilité de contester les décisions gouvernementales.

Cependant, ce droit est de plus en plus restreint par des règlements municipaux et des interventions policières brutales. Par exemple, le Règlement sur la sécurité lors de la tenue de rassemblements sur la voie publique (R.V.Q. 2817) adopté par l’administration Marchand à Québec, a été critiqué pour sa portée trop large et son potentiel à restreindre injustement les manifestations pacifiques.

Critique des Pratiques Policières

Les forces policières, censées protéger les citoyen·nes et maintenir l’ordre public, sont souvent accusées de dépasser leurs prérogatives. Plusieurs incidents récents soulignent des pratiques problématiques :

  1. Profilage Racial : Le profilage racial reste un problème majeur au Québec. Les minorités visibles sont disproportionnellement ciblées par les forces de l’ordre lors des manifestations, ce qui crée une méfiance et une aliénation parmi les communautés affectées.
  2. Usage démesuré des armes : L’utilisation excessive de la force, y compris des gaz irritants et du poivre de Cayenne, est fréquemment rapportée lors des manifestations. Cette approche violente ne fait qu’aggraver les tensions et transformer des rassemblements pacifiques en confrontations dangereuses.
  3. Attaques contre les jeunes : Les jeunes, souvent à la pointe des mouvements socio-écologiques, sont particulièrement vulnérables aux répressions policières. Leur engagement pour des causes telles que le climat, les droits humains et l’égalité sociale est souvent accueilli par des mesures coercitives, freinant ainsi leur participation active à la vie démocratique.

Un appel à la Réforme

Pour que le droit de manifester soit pleinement respecté, une réforme profonde des pratiques policières est nécessaire. Les forces de l’ordre doivent être formées à gérer les manifestations de manière proportionnée et respectueuse des droits humains. Il est crucial de mettre fin au profilage racial, et garantir que les interventions policières soient basées sur des principes de justice et d’équité.

Les autorités doivent également s’engager à revoir les règlements restrictifs et à dialoguer avec les organisateurs de manifestations pour assurer des rassemblements sécuritaires et respectueux des droits. En outre, il est impératif d’instituer des mécanismes de surveillance communautaires et indépendants pour enquêter sur les abus policiers et garantir la transparence et la responsabilité.

Dans une démocratie, le droit de manifester est sacré. Il est un baromètre de la santé de notre société et de notre engagement envers les principes de liberté et de justice. La répression brutale et les pratiques policières discriminatoires ne doivent pas devenir la norme. Au contraire, il est de notre devoir collectif de défendre ce droit et de veiller à ce que les forces de l’ordre respectent les droits fondamentaux de tous les citoyen·nes. C’est ainsi que nous pourrons bâtir une société véritablement démocratique, inclusive et juste.

Sources

– L’équipe du FCTÉ